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Les « plantaddict » aiment-ils vraiment la nature ?

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Qui aurait pu penser qu’à la lisière de ces verdoyantes jungles d’intérieur ne se trouvent pas toujours des passionnés de la nature. Achats compulsifs de plantes produites à l’autre bout du globe, exploitation de matières premières rares, usage de produits chimiques… Entre ignorance ou pleine conscience des conséquences de leurs choix, les plantaddicts ne seraient-ils pas aussi sensibles à la cause environnementale que l’on pourrait croire ?

À force de me questionner sur mes propres choix et de me renseigner sur mon impact environnemental, j’ai vite réalisé à quel point ma passion pouvait être en contradiction avec mes valeurs. J’essaie tant que possible de limiter mon impact personnel et professionnel sur l’environnement, je sensibilise parfois des proches et collègues à ce sujet… Et en tant que passionnée des plantes, je pensais dur comme fer que c’était justement une belle passion bien “verte”. Je vous avoue que j’ai vite eu une sensation de douche froide en réalisant à quel point je me trompais et qu’à part leur couleur, mes plantes n’avaient rien de “vert”. À l’occasion du lancement de la catégorie écologie sur le blog, je voulais dédier ce coup d’envoi à ce que nous (les “plantaddict”) avons comme responsabilités au travers de notre passion et comment nous pouvons limiter notre impact, tout en continuant de nous faire plaisir.

Le mot de la team Pothos

Ne voyez aucune attaque personnelle dans cet article qui n’a pour seul but de sensibiliser.

Entre passion et effet de groupe, et si on était influencés ?

collection de plantes ecologie plantaddict

Aussi surprenant que cela puisse sembler, la célèbre course aux followers et aux partenariats se retrouve également dans la communauté des « plantaddict ». 

Cette explosion de comptes de collectionn.eurs.euses de plantes remonte à la crise sanitaire. Pendant cette période de confinement, nombreuses étaient les personnes qui se sont tournées vers les plantes pour occuper leur quotidien… Jusqu’à faire naître une passion et l’envie de la partager sur les réseaux sociaux. 

Progressivement, ce « retour vers la nature » d’un grand nombre de nouveaux passionnés a ravivé ce marché et fait naître de nouveaux commerces en vogue. Aujourd’hui, on ne compte plus le nombre de ventes éphémères, d’eshop ou de producteurs de plantes d’intérieur pour répondre à cette demande qui tend à baisser (on abordera ce sujet prochainement).

Dans une interview avec la fondatrice de Brume la Boutique, Sabrina Izza comparait justement la passion des plantes à la fast-fashion. « On est dans une surconsommation », nous expliquait-elle. Et pour cause, on se rend vite compte que ce sont les plantes les plus rares, exceptionnelles et sans défauts qui génèrent le plus d’engagement. Ce qui peut nous questionner sur les réelles motivations derrière notre passion, finalement.

Moi même, j’ai sans aucun doute déjà été influencée par Instagram pour acheter quelques-unes de mes plantes. Aurais-je autant de plantes chez moi et ces espèces en particulier si je n’avais pas accès aux réseaux sociaux ? La question fait mal à mon égo. Mais pour être franche, il est possible que je n’aurais pas forcément acheté certaines de mes plantes. Car elles m’apportent finalement plus de stress que de bonheur à entretenir.

Ces influences d’achats ne sont pas nouvelles. C’est l’effet « bandwagon » (aussi appelé “effet de mode”). Un biais cognitif bien ancré, où nous sommes constamment influencés par un groupe social et vivons par mimétisme en son sein. Je vous épargne les détails de ce sujet (fort passionnant soit dit en passant), mais vous voyez sûrement déjà l’idée. Et à l’instar de la fast fashion, la culture des plantes a aussi un impact lourd sur la planète.

L’achat de plantes d’intérieur : une frénésie compulsive créée par les eshop et ventes éphémères

Le marché des plantes d’intérieur a bondi depuis le confinement grâce aux ventes éphémères dont les prix sont alléchants. Entre 20% et 30% moins chers que les jardineries traditionnelles puisqu’on ne passe plus par des intermédiaires de ventes, ces plantes vertes ont un succès incroyable. 

Mais d’où viennent ces plantes ?

Sous nos latitudes, il est difficile de faire pousser des aracées naturellement. Et pourtant, il y a quelques années, nous avions quelques producteurs de plantes vertes dans l’hexagone. Mais la concurrence néerlandaise est si forte que nombreux ont dû mettre la clé sous la porte.

Aujourd’hui, ce sont 75% des plantes achetées en France qui sont produites et importées des Pays-Bas. C’est à Westland que les plantes tropicales sont majoritairement cultivées. Elles viennent d’abord des quatres coins du monde (Guatemala, Sri Lanka…). C’est dans cette commune surnommée « la ville verte » que les plantes sont sous des serres chauffées au gaz et éclairées quasi non-stop, bourrées de pesticides et d’engrais chimiques pour encourager une croissance rapide. Un peu ironique pour « une ville verte » vous me direz. Après une vingtaine de semaines de culture, les plantes parcourent ensuite plusieurs milliers de kilomètres avant de se retrouver chez nous. Rien que les serres des Pays Bas émettent six fois plus de CO2 que le transport aérien ! 

Heureusement que des alternatives existent pour se produire plus localement.

Comment limiter son impact sur l’environnement lorsqu’on souhaite avoir une nouvelle plante ?

Avant tout, demandez-vous pourquoi vous souhaitez cette plante. Connaissez-vous ses besoins et pouvez-vous y répondre ? En avez-vous vraiment envie ? N’oubliez pas qu’il s’agit d’un être vivant et qu’un achat doit être réfléchi. Si la réponse est “oui” pour toutes ces questions, vous pouvez trouver votre plante de rêve de façon plus responsable.

Le troc de plantes et de boutures, une alternative écologique à l’achat

La première alternative écologique et économique est le troc. Proposez à d’autres passionnés des boutures d’une valeur équivalente à celle que vous convoitez, et le tour est joué.

Ce principe basé sur l’échange est de plus en plus en vogue depuis le confinement. De plus, le troc permet de générer de belles économies et de rencontrer d’autres « plantaddict » !

Des plateformes de troc existent tels que les groupes Facebook « Troque ta plante » ou l’application Junglit.

La récup’, une façon de sauver des plantes abîmées qui ont besoin d’un coup de pouce

Saviez-vous que les jardineries se débarrassent en moyenne de 10% à 20% de leurs stocks ? Heureusement qu’il existe aujourd’hui des solutions pour sauver ces plantes et leur donner une seconde chance. 

Pour les Lyonnais, vous avez même une structure de plus en plus en vogue : la SPV. La société protectrice des végétaux récupère les plantes dont veulent se débarrasser les entreprises et les particuliers. Elle leur refait ensuite une santé avant de les proposer à nouveau à la vente (à prix juste et abordable).

Quant aux autres, n’oubliez pas d’installer des applications anti-gaspi telles que Phénix et Too good to go qui proposent justement des paniers de plantes à prix doux.

Acheter chez quelques producteurs français, une façon de soutenir l’économie locale et d’encourager le développement de ce marché en France

De plus en plus de passionnés ont fait importer des plantes adultes en vue de les multiplier et créer leur propre production. 

Les prix des plantes françaises auront inévitablement un coût plus élevé car les conditions de cultures nécessitent un investissement particulier (serre, lampes horticoles, humidificateurs, tapis chauffant…). Certes, leur impact environnemental ne sera pas nul, mais minus les centaines de kilomètres et intermédiaires entre une plante néerlandaise et française, la différence est notoire.

Zoom sur Plant and Stories

A peine lancée, la jeune entreprise familiale connaît déjà un succès fou. Après le plant truck itinérant dans toute la France, Plant and stories a lancé un eshop, suivi de l’achat et la construction d’une serre. L’entreprise projette de vendre ses propres plantes à terme et promet déjà une stratégie RSE (responsabilité sociétale des entreprises) intéressante : installation de panneaux solaires, récupérateurs d’eau, cours éducatifs … Bref, affaire à suivre et à soutenir !

Les habitudes d’entretien des « plantaddict » ont aussi un impact négatif sur l’environnement

Ces substrats populaires dans nos terreaux qui ont un impact conséquent sur l’environnement

La sphaigne et la tourbe : deux substrats en vogue dans les recettes partagées sur le web pour leurs avantages. Ces derniers permettent une rétention d’eau et acidité idéale pour nos plantes. Et pourtant, les acheter finance directement une exploitation lourde et nocive sur les tourbières et la biodiversité qui en dépend.

La formation de tourbe peut prendre des milliers d’années (entre 1000 et 10 000 ans pour seulement 1m de profondeur). Voire des millions d’années, selon les conditions environnementales. La tourbe se forme à partir de la décomposition de matière organique, dans des conditions anoxiques (c’est-à-dire sans oxygène). En bref, on exploite et épuise une ressource qui n’a pas le temps de se régénérer. Est-ce vraiment nécessaire de contribuer à cette exploitation pour le plaisir de cultiver des plantes qui pourraient bien vivre sans ?  

Mais à quoi sert une tourbière ?

  • Les tourbières permettent de stocker du carbone, réduisant ainsi la quantité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (donc le changement climatique). 
  • Elles régulent l’eau et permettent de prévenir les inondations. 
  • Elle protègent de nombreuses espèces en danger (oiseaux, reptiles, grenouilles et mammifères)

Malheureusement, la sphaigne et la tourbe se trouvent souvent dans des mélanges de terreau. Vous pouvez donc déjà commencer à acheter des terreaux sans tourbe et éviter d’ajouter ce type de substrats dans vos mélanges… Ou alors commencer à cultiver votre propre sphaigne (un tutoriel arrive bientôt).

Les producteurs et revendeurs de plantes ont aussi leur rôle à jouer. En tant qu’intermédiaires entre les plantes et les collectionneurs, ils doivent sensibiliser les acheteurs et montrer l’exemple.

La lutte contre les nuisibles de nos plantes d’intérieur, un danger sur notre propre santé et celle de ceux qui nous entourent

Certaines dérives sont aussi dans notre routine d’entretien malheureusement. Prenons l’exemple des nuisibles. Alors que des alternatives naturelles existent pour lutter contre certains indésirables, nous avons pour certains le réflexe de lutter contre, avec des produits chimiques. En les utilisant dehors, c’est la biodiversité alentour qui souffre, en les utilisant dedans, c’est nous-même, nos animaux et nos proches qui en sont les victimes.  

Une alternative naturelle ? 

  1. La prévention est la clé : nettoyez régulièrement les feuilles à l’eau et pourquoi pas avec du savon noir naturel 
  2. En curatif comme en préventif, les auxiliaires sont redoutables. Ce sont de petits insectes qui travaillent aux bénéfices de vos plantes en se délectant des nuisibles. (On vous prépare des contenus sur ce sujet prochainement.)

Ces accessoires pour créer un microclimat adaptés au besoin de nos plantes

ecologie plante nature plantaddict lampe horticole

En achetant des plantes tropicales, il est évident que sous nos latitudes, leur entretien va nécessiter l’achat de certains accessoires pour leur permettre de vivre. C’est notamment le cas des lampes horticoles, tapis chauffants et humidificateurs.

Créer ce micro-climat semblable à leur environnement naturel est presque inévitable selon les espèces qu’on choisit d’acheter.

Pour remédier à l’usage de ces produits, vous pouvez : 

  • Utiliser des astuces pour augmenter le taux d’hygrométrie dans votre maison
  • Rapprocher vos plantes d’une source de lumière adaptée à leurs besoins
  • Utiliser vos accessoires pendants les heures creuses
  • Prendre un abonnement auprès d’un fournisseur d’électricité verte. Votre consommation personnelle financera directement les énergies renouvelables.
  • Récupérer de l’eau pour arroser vos plantes : de pluie, l’eau froide de la douche, l’eau d’aquarium…

Cet article n’a pas pour vocation de cibler des passionnés en particulier, mais d’essayer de faire prendre conscience que cette passion des plantes n’est pas aussi verte qu’on pourrait croire. Il y a des choix que nous pouvons faire pour acheter et entretenir nos plantes en limitant notre impact.

Vous avez quelques pratiques écologiques chez vous pour entretenir vos plantes ? Partagez-les nous en commentaires ou rejoignez notre équipe de contributeurs !

Écrit par

Philodendrey

Collectionneuse de plantes et de chats, j'ai progressivement transformé ma maison en petite jungle.


Commentaires (2)

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  • jardin de la mandragore - 17/02/2023

    Très bel article et il y a tant à dire sur le sujet.

    Je suis toujours mal à l’aise avec les ventes de plantes pour tous. J’ai parfois l’impression que les plantes vont être aussi éphémères que le point de vente. Les vendeurs sont des caissiers, il n’y a aucun conseil ni aucune information réelle sur les besoins de la plante et bien sur le producteur et les conditions de production ne sont pas connues.

    Je suis une acheteuse régulière de plantes d’intérieur et mon intention est bien pour chaque plante de lui offrir la meilleure vie possible dans mon appartement mais sans lampe, sans humidificateur, sans tapis chauffant et sans sphaigne. Et la plupart des plantes s’en accommodent en fait.

    A la décharge des consommateurs que nous sommes, la provenance des plantes n’est jamais indiquée en jardinerie, excepté les label plante bleue.

    Concernant l’arrosage, je suis d’accord avec toi. En réutilisant l’eau de lavage des mains (avant l’application du savon), l’eau de lavage des légumes et l’amorce de la douche, je n’ouvre plus le robinet pour l’arrosage.

    De façon plus globale, la production de plantes d’ornement en Europe va poser question. L’hiver 2022-2023 est le plus sec depuis 1989 d’après le média Vert et succède à l’été le plus chaud et sec. Mais la végétalisation des villes et des habitats est aussi une des solutions pour rafraichir donc tout cela est bien compliqué 🙁

    • Philodendrey | Les Pothos - 19/02/2023

      Merci beaucoup pour ce commentaire 🫶 En effet, le secteur va être sacrément bouleversé par le dérèglement climatique (ainsi que la crise énergétique)… c’est inquiétant. Je suis ravie de lire que tu acclimate tes plantes sans tous ces accessoires, c’est super !

N'en restons pas là...

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